vendredi 2 mars 2012

La Guadeloupe en texte


Lundi 13 février (suite)

Lundi 13, 14 h, on est à quai. L’arrivée étant initialement prévue pour le 14, nous n’avons donc encore ni voiture, ni logement (réservés pour le lendemain). Le commandant nous propose gentiment de rester une nuit sur le bateau, histoire de nous dépanner et de se séparer en douceur. Nous acceptons bien volontiers.
On profite de cet après-midi de libre pour prendre contact avec la plus importante ville de l’île : Pointe à Pitre. Port de commerce excentré oblige, on prend un taxi jusqu’au centre-ville. Il nous dépose un peu au hasard à un carrefour. Le premier contact est sans transition. On regarde autour de nous et on réalise que l’on est les seuls blancs. Il y a beaucoup de gens dans les rues, mais surtout  des jeunes en train de squatter en écoutant de la zik. La première impression est que le cargo s’est trompé et nous a déposés quelque part sur le continent africain. Après un moment de déboussolement on réalise que nous sommes redevenus terriens et que nous devons nous remettre à agir par nous-mêmes (et oui une semaine à se faire servir à heures fixes et on prend de mauvaises habitudes…). Alors action : la mission du jour est de choper quelques broutilles  comme  une carte sim avec un numéro guadeloupéen et de trouver un cyber café.
On découvre très vite qu’il y a deux catégories de guadeloupéens : ceux qui à priori ne sont pas fans des « visages pâles », et les autres. Les premiers se contentent de nous ignorer totalement, les seconds, qui sont les plus nombreux, sont super accueillants ! Ils nous parlent très facilement, sont très serviables, bref, bien plus sympathiques que la majorité des métros (les blancs de métropole)… Ici la réponse à toutes tes questions c’est : « paw ni powblem ». Quand on demande notre chemin c’est « cé cowme tou veu ». Le vouvoiement est un concept inexistant. Leur accent hyper nasal à base de « wa » est un régal, même si on a même du mal à en comprendre certains. Niveau climat, c’est juste parfait, un peu humide mais sans être étouffant. Le thermomètre affiche un bon 29 en journée comme en soirée (allez, peut-être 27…).
Nous déambulons un peu dans la ville qui, fidèle à sa réputation, n’a pas vraiment de charme particulier. Elle est assez étendue avec, en périphérie, des zones commerciales, et un centre-ville qui  vit le matin mais qui se vide totalement à partir de 18 h. Il n’y a pas vraiment de quartier typique ou de choses extraordinaires à voir… On se dirige donc vers la Marina, le spot à touristes, où nous avons rendez-vous avec nos deux acolytes d’une semaine, Andréas et Olivier, et certains membres de l’équipage. On se fait un bon petit resto où on découvre la cuisine créole. Entre autres nous goûtons le lambi, un gros mollusque antillais, de bons accras et du poisson « à la créole », parfumé et mariné, qui nous ravit après le régime viande du cargo.
On retourne passer notre dernière nuit à bord du Fort Saint Louis, où je vais, alors que nous sommes solidement amarrés au quai, roulé toute la nuit dans mon lit…

Mardi 14 février

Aujourd’hui est une journée perdue, on le sait par avance, et cela ne nous ravit pas. La voiture de loc ne sera pas dispo avant 17 h, et nous devons transférer tout notre bordel du cargo vers le bungalow. Heureusement notre logeuse, Magali, nous propose de venir nous chercher au port ce matin pour nous installer. Malgré nos nombreux messages alarmants « tu sais, on a vraiment beaucoup de bagages… comment te dire, des sacs énormes, mais aussi, un chien et pour finir un board bag pas vraiment discret ». Elle n’a pas peur, tant mieux. On décide quand même de la faire en deux étapes. On transporte sur le quai tous les sacs et laissons la partie « windsurf » à bord. Toute personne étrangère ne pouvant franchir l’entrée du port, Magali ne peut pas venir nous chercher sur le quai. Chargés comme des mules il faut donc que l’on sorte du port. Le plus simple serait de se faire prendre en stop par un des gars de la CMA CGM qui tournent en boucle sur les quais dans leurs camionnettes. On en arrête donc un, et on lui demande de nous emmener à la guérite de sortie. Sa réponse est directe « paw ni powblem ». Ce n’est qu’une fois à l’intérieur du véhicule que nous mesurons l’ampleur du phénomène. Il ne parle pas, il hurle !! Et avec un accent incroyable où l’on  ne comprend que la moitié de ce qu’il nous dit. Comme s’il n’y avait pas assez de bruit, il laisse marcher la radio à fond qui, elle aussi, hurle des trucs antillais. Et en plus, il est extrêmement bavard. Mais il est tellement sympa que l’on espère vraiment que tous les antillais soient comme lui : un vrai bon gars qui nous raconte en cinq minutes toute sa vie, et qui serait prêt à nous faire visiter toute l’île dans la journée s’il ne travaillait pas… Après quelques minutes de trajet, il nous dépose, sourds, à la sortie du port.
Magali arrive quelques minutes plus tard. Nous chargeons les sacs et, un scénic n’étant pas extensible, nous décidons de ne pas abuser en essayant de charger aussi le board bag. Nous le laissons à bord et reviendrons le chercher en fin de journée avec la voiture de loc.
Elle nous conduit à Petit Bourg, sur Basse Terre. On prend une claque verte, après une semaine de claque bleue. La végétation est luxuriante, suivant le terme approprié, baignée par une lumière et un ciel de mistral. On découvre notre habitation : un bungalow tout en bois, divisé en deux parties. Une partie nuit, fermée, avec chambre et salle de bains, et une partie jour, cuisine, coin repas, hamacs, le tout sur une terrasse couverte totalement ouverte sur un jardin tropical. Le premier vis-à-vis est un manguier ! Bref, l’endroit a beaucoup de charme et semble tout à fait propice à un excellent séjour !
En fin de journée, Magali nous amène à l’aéroport des Abymes, où nous devons récupérer la voiture de loc. Nous sommes un peu sceptiques sur le lieu de rendez-vous, à l’opposé des gros loueurs style Hertz…etc, et en plein milieu d’un parking. Nous découvrons au bout de quelques minutes un blanc devant une Fiat Punto qui a visiblement déjà beaucoup roulé... C’est une catégorie éco, et on comprend pourquoi quand on fait le tour de la bagnole… Elle est rayée, enfoncée et les deux portières ont été fracturées. Même la peinture est en mauvaise état. Elle a vraiment l’air d’avoir enduré tout ce qu’une voiture peut endurer... Bref, elle ne craint plus grand-chose et c’est tant mieux. On la baptise instantanément « ti poubelle ». Le gars n’a d’ailleurs pas l’air stressé pour elle : « pour le retour tu la laisses sur le parking avec la clé dans le coffre et le ticket de parking dedans. Je passerai la récupérer l’après-midi… le matin faut profiter de la plage quand même ! ». On file au port autonome pour récupérer les planches, le cargo devant partir le soir même pour la Martinique. Chargés comme des cochons, nous nous arrêtons quand même à un supermarché pour faire des « courses de fond », en gros la base de notre alimentation pour les sept mois à venir, c’est-à-dire des pâtes, des légumes et des fruits. Nous découvrons, planté devant l’entrée de service, un container blanc fraichement débarqué du Fort Saint Louis ! On va retrouver et acheter ce que l’on a trimballé pendant 8 jours !
En rentrant nous prenons l’apéro avec Magali et Alain, son mari. Autour d’un délicieux ti punch cerise, nous discutons de notre voyage en cargo qui les intrigue beaucoup et de la Guadeloupe. J’en profite pour jeter un œil sur le net, et je vois que windguru annonce de la houle de nord ! Donc potentiellement le Moule, le seul spot tribord de l’île, pourrait fonctionner le lendemain!

Mercredi 15 février

On pensait se la jouer tranquille en faisant un peu de tourisme pendant quelques jours et en reprenant la planche sur les spots cools de la côte sud, mais une rentrée de houle de nord est trop précieuse pour la laisser passer. Pas question de la snober pour apprendre quelques jours plus tard qu’on a loupé THE session ! On charge donc le matos, et direction Grande Terre. La route pour le Moule traverse l’île du nord. Elle a moins de relief que sa sœur et est moins abondamment arrosée. Il y a de nombreux champs de canne à sucre et des bœufs paissent un peu partout le long de la route. Arrivés au Moule, on découvre avec joie une solide houle de NNW d’un bon deux mètres. On tourne pas mal pour trouver une mise à l’eau car tout le littoral est flanqué de corail ou de rochers. On trouve enfin un bout de sable, avec des vagues qui pétent sur le reef à quelques centaines de mètres. Il n’y a personne à l’eau, à part quelques kites qui tirent des bords dans le lagon. Une pseudo passe est repérée par deux piquets, mais, après discussion avec les kiteux, on n’arrive toujours pas à se faire une idée de l’endroit où il faut passer. Alors que pour l’un il faut absolument passer au vent des piquets, pour l’autre, il ne faut passer qu’entre les piquets… Bref, ils n’en savent rien puisqu’ils ne naviguent pas en vagues. Ils sont tout de même d’accord pour dire que si tu rates le channel, tu te fait déchiqueter par le corail, et ton matos avec. Donc ça semble assez chaud, et la raison nous dicte d’attendre qu’il y ait des planchistes qui savent de quoi ils parlent avant de se mettre à l’eau ici. De plus, le vent est très léger, environ 10 nœuds. On se donne le temps du pique-nique pour observer le spot et comprendre comment il fonctionne. On mange nos sandwichs en regardant dérouler une vague magnifique… Ça donne quand même envie… Malheureusement avant même la dernière bouchée le vent tombe complètement. Ce sera donc pour une prochaine...
On décide d’aller se balader vers Port Louis, un spot de surf réputé, qui marche lui aussi par houle de Nord. On découvre ainsi la plage du souffleur, qui est très belle, mais la houle n’y rentre pas. La plage est blindée de touristes qui se baignent dans des enclos ou se font cramer sur des serviettes. On décide de continuer à pied dans le sable chaud. La plage continue longtemps et devient moins fréquentée. On devine une vague au fond qui a l’air de bien fonctionner. On ne peut plus vraiment se baigner ici car la « caille » longe le sable, mais c’est notre première plage de sable fin bordée d’une eau turquoise et de cocotiers ! Le mythe enfin sous nos yeux. La carte postale 3 D qui nous fait tant rêver durant nos services de récré de janvier, emmitouflés dans notre veste et abrutis par les hurlements de centaines de gosses déchainés… Un peu plus loin la plage longe un cimetière typiquement guadeloupéen où certaines tombes, carrelées de noir et blanc, ressemblent à de véritables maisons miniatures, alors que d’autres ne sont qu’un simple amas de coquillages. A la pointe nord de la plage on trouve la fameuse vague de reef, bien creuse et balayée par un petit vent off shore. Nous y faisons notre premier bain antillais dans une eau un peu fraiche… 26°C

Jeudi 16 février

Aujourd’hui direction Pointe Noire. On prend la route de La Traversée qui traverse Basse-Terre d’est en ouest. De part et d’autre de la route se développe la forêt tropicale, verte et dense, qui s’accroche aux nombreuses collines et montagnes. De multiples ballades partent se perdre dans la forêt, mais cette zone est un parc national, donc interdite aux chiens. Et après avoir subi courageusement une semaine de cargo, Nouky ne peut rester une journée de plus sans aller gambader et renifler un peu partout. On tire donc jusqu’aux « Mamelles », deux monticules de plus de 7OO mètres, avant de redescendre vers la côte. En arrivant vers la mer, la route est bordée de maisons clairsemées. La plupart sont construites sur le modèle créole, en bois avec un toit de tôle de couleur, et entourées d’une terrasse couverte, au milieu de jardins luxuriants. On arrive enfin à la mer des Caraïbes, et on fait halte à la première plage, du même nom. On découvre une plage de sable noir, aux eaux tintées de turquoise. On se gare devant les quelques lolos (boui-boui antillais) qui longent la plage. Il n’y a pas foule, et c’est tant mieux. On commence à s’éloigner un peu en marchant sur la plage, et on croise un vieux pécheur rasta qui n’a pas l’air très pressé d’attraper du poisson. Déjà d’habitude un pêcheur ne parait jamais très énervé derrière sa ligne, mais lui, posé sur son seau en plastique, parait le maître incontesté de la nonchalance. A quelques pas de lui pêchent également des goélands. Aussi inactifs que leur concurrent humain, ils se réveillent subitement, font quelques battements d’ailes pour se dégager de l’eau, et retombent en piquet. Une technique à priori imparable, puisqu’après chaque plongeon on voit leur gueule s’agrandir comme un soufflet pour avaler leur proie. Un peu plus loin la plage devient vraiment sauvage. Recouverte de bois mort et d’algues, et avec son sable noir, elle est aux antipodes des plages stéréotypées des Caraïbes. Mais elle est pourtant magnifique.  Après quelques jetés de bâton au poilu, on fait demi-tour, pour aller pique-niquer à l’ombre d’un carbet. Ces tables couvertes dont sont équipées la plupart des plages guadeloupéennes sont le rendez-vous favori des antillais qui s’y retrouvent le week-end pour manger, boire du ti-punch et faire la fête. Après une bonne ballade sur la plage, l’ombre fait vraiment du bien, car le soleil cogne dure malgré notre pastissage en règle de crème solaire, à la parisienne, et notre casquette (passer en quelques jours de l’hiver à l’été est magique pour nous, mais pas pour la peau…). La mer est un peu agitée pour se baigner, alors on décide d’aller voir plus loin si on ne trouverait pas un petit lagon... On roule jusqu’à « Ti anse » à « Baille-Argent ». On se met à l’eau avec masque et tuba pour un premier bain dans la mer des caraïbes. Petite plongée sympa en compagnie de nos premiers poissons multicolores !

Vendredi 17 février

Une journée avec, une journée sans, c’est notre programme. Alors… ? Une journée sans… voiture ?  Planche ? Manger ? Non, sans Nouky ! Il a eu droit hier à sa ballade et à de nombreux bains, donc aujourd’hui on le laisse tomber, et on part dans le parc. Ce sera la Souffrière ou les chutes du Carbet, suivant la météo. On prend donc la route du sud, direction Basse Terre (la ville, pas l’île, bien que la ville soit sur l’île…). Le temps est mitigé, les nuages ont pris d’assaut quelques pics, mais certains sont dégagés. On s’arrête demander notre chemin à un gars qui est en train de traiter ses plantes sur le bord de la route. On ne sait pas si les vapeurs de son désherbant sont extrêmement toxiques, mais il commence à nous élaborer des théories invraisemblables sur on ne sait quoi, à moitié en français, à moitié en créole, sans le moindre rapport avec notre recherche… Comme on n’arrive pas bien à savoir s’il plaisante ou s’il s’énerve, on décide de partir vite fait avant qu’il nous pulvérise son truc sur la gueule. Oui, il y a aussi des allumés dans les îles… Un peu plus loin, on tombe sur un gars plus normal, qui nous indique la Soufrière en montrant du doigt un pic perdu dans le mauvais temps. Ce sera donc le Carbet. Il nous amène sur la route des chutes avant de continuer la sienne.
La route qui conduit aux chutes nous enchante. Elle est étroite, peu fréquentée (mis à part par les touristes…), et noyée dans la jungle. Vertes fluo, les plantes tropicales semblent vouloir engloutir la voiture. On croise des bambous géants de 15 cm de diamètre, et hauts de plus de 10 m. Il y a trois chutes. La troisième est fermée suite à des éboulements. La seconde se situe à seulement vingt minutes de marche. Elle est du coup la ballade choisie par la majorité des touristes, mais elle est visible uniquement de loin, également à cause d’un éboulement. On opte donc pour la première qui se trouve à 1 h 45 de montée à travers la jungle. Les premières minutes se font sur un boulevard, une double voie aux larges marches, jusqu’à l’embranchement de la seconde chute. Passé l’embranchement, le boulevard se transforme en sentier. On est bizarrement beaucoup moins nombreux. Sur le chemin on doit se hisser, tantôt entre des pierres, tantôt entre des racines. La montée est d’autant plus difficile que tout est glissant, forte humidité oblige. Malgré les grosses gouttes qui nous dégoulinent du front, nous sommes ravis de faire cette randonnée (après beaucoup d’inactivité) en plein cœur de la forêt tropicale. Ici on comprend ce que veut dire luxuriant. Il s’agit en fait d’un superlatif d’un mot inconnu, qui serait le croisement de vert et abondant. Chaque millimètre carré est colonisé par une espèce. Les feuilles sont démesurées. Les fougères sont énormes si bien que je pourrais facilement me faire un sac de couchage dans une seule de leur feuille ! Certains arbres allongent leurs racines sur plusieurs mètres, et des lianes leurs tombent des branches. D’autres sont entièrement recouverts de mousse (ben comment je vais reconnaître le nord, moi… ?). Après une bonne marche on arrive à la chute. Elle est divisée en 2 sauts pour une hauteur totale de 120 mètres. Même s’il n’y a pas beaucoup de débit, elle est magnifique. On est à ses pieds, et on admire toute sa hauteur, bordée par des à pics recouverts de végétation. Le balai des nuages au-dessus fait jouer les lumières et les couleurs sur l’eau qui se déverse. Impossible de résister à un bain dans le bassin qui réceptionne toutes ces eaux. En remake de la pub pour « Tahiti douche », on savoure le spray naturel, qui donne l’impression d’être sous un énorme pommeau de douche à l’italienne. Mais l’eau est quand même fraîche et on ne s’éternise pas. On mange au pied de la cascade pour profiter au maximum du spectacle, d’autant que de là, on aperçoit aussi la mer et l’île de Marie Galante ! On redescend par le même chemin qu’à l’aller, en faisant un petit détour pour aller voir la deuxième cascade qui est elle aussi superbe ; un seul plongeon de plus de cent mètres, mais que l’on contemple à distance.

Samedi 18 février

Quand on est sur une île, il faut se mettre au rythme de l’île. On s’y est donc mis. On s’imaginait passer de longues soirées en profitant d’un beau coucher de soleil et d’une température clémente, motifs suffisants à des apéros à rallonge. Et bien non ! Ici tout se fait le matin, car le soleil se lève très tôt, vers six heures, et toutes les activités débutent avec. A commencer par celles du coq. On avait dû être chanceux jusque-là, car on n’avait rencontré que des coqs soit compréhensifs, soit lève-tard, mais qui nous laissaient roupiller le matin. Mais il en va autrement des coqs antillais, qui défendent ardemment la réputation des coqs, qui veut qu’un coq commence à chanter avant le lever du soleil. Et le coq qui vit près de chez nous tient à être exemplaire, il ne plaisante pas avec la ponctualité. Tu ne peux donc échapper au rythme collectif. Autre signe qui ne trompe pas, les Antillais, passé midi, te disent « bonsoir » ! Le soleil, quant à lui, se retire vers 18 h, après une bonne journée de travail à tanner le cuir de ses sujets, sans distinction de couleur. Ainsi le soir, tout ferme tôt, et tout s’éteint vite, comme si la Guadeloupe devait se ménager en prévision d’une nouvelle journée.
On est donc dans les startings blocks tous les matins, et on en profite. Car, à ma grande surprise (je l’admets) la Guadeloupe recèle de tonnes de choses à faire. La géographie particulière de cette île papillon, alliée à des différences de climat, font que chaque coin de l’île a sa propre spécificité. On a donc bien à faire, et malgré des distances sur la carte restreintes, on bouffe du kilomètre. Heureusement que nous sommes placés à Petit Bourg, près de la jonction des « deux terres », où on occupe une place centrale. On y est proche de rien, mais pas loin de tout.
Nous étions ainsi ce matin sur la côte sud de Grande Terre. Connue pour ses plages de sable fin et ses complexes touristiques, on n’était pas très attiré par cette partie de l’île. Mais il faut quand même aller voir à quoi ça ressemble, d’autant que les principaux spots de planche se situent dans le coin. On part donc en repérage. On passe fièrement devant Pointe à Pitre en restant sur la quatre voies, la seule grande route de l’île. Après le Gosier, la route redevient une voie unique, et la circulation se fait plus dense. Il n’est que 10 h du matin quand on arrive à proximité de Sainte-Anne, mais il y a déjà des embouteillages pour rentrer dans la ville. Pour contourner le bouchon on prend donc une route de traverse, que l’on espère bonne. Par acquis de conscience, je m’arrête demander la route à un gars sur le bas-côté. Ce n’est qu’une fois arrêté que je m’aperçois qu’il a un coupe-coupe dont la lame atteint facilement les cinquante centimètres… En parlant, il le pose sur la portière passagère, à dix centimètres de Laeti. Pourvu que ce ne soit pas un allumé… Il se révèle en fait super sympa et nous dit « ouais, paw di powblem, tu va tou doia ». La route prend des allures champêtres, avec de nombreux bœufs attelés à des charrues ou qui paissent tranquillement dans les champs. On récupère la route de Saint François, et nous arrêtons à la plage de Bois Jolan. C’est le choc, on est face à LA plage. Alors oui je sais, j’ai déjà fait le coup avec celle de Port Louis, mais celle-ci est parfaitement shapée. La barrière est idéalement placée à une centaine de mètres, formant un lagon peu profond aux différentes teintes étincelantes. Le sable est bien blanc, les cocotiers ont une bonne inclinaison (je crois que c’est le même paysagiste qu’à Pize), le petit ventilateur alizé fait bouger négligemment les palmes juste ce qu’il faut… Bref, on est sous le charme. On la parcourt de long en large, ébahis. On rencontre plusieurs guadeloupéens, on taille une bavette, et on la fait même cuire (les antillais ne se forcent pas trop pour parler, ça vient tout seul…), et Nouky fait des longueurs, sur le sable comme dans l’eau. De plus, dans la soit disant zone hyper touristique, alors qu’on est pourtant pendant la haute saison et les vacances scolaires des métros, il n’y a pas foule ! Pour couronner le tout, alors qu’on s’attendait à des barres d’immeuble, il n’y a que des champs…! Incroyable ! On savoure ce spectacle en faisant éclater nos préjugés ! En fait de complexe touristique, il n’y a que le club med qui soit vraiment important. Pour le reste, les guadeloupéens ont veillé à préserver le littoral. Les hôtels sont construits sur le modèle de l’habitat local et la plupart des logements touristiques sont des bungalows ou des cases. Pour preuve de cette tranquillité, on va pique-niquer sur la plage d’Anse à la barque qui est certes moins paradisiaque, mais que nous avons pour nous seuls !
Saint François non plus n’est pas la grosse station balnéaire sur dopée à la Costa Brava. C’est une petite ville où aucun immeuble ne vient toiser les habitations individuelles. Bon, ils ont quand même dû concéder un golf, au cas où certains touristes arrivent à s’ennuyer malgré les différentes activités que propose l’île… On prolonge la route pour aller à l’extrémité Est de l’île : la pointe des châteaux, la première image de Gwada que l’on a eu du cargo. Une marche annoncée comme exténuante par le panneau à touristes, nous amène, en moins de cinq minutes, à un promontoire. La vue est magnifique. On voit le petit bras de mer, par lequel nous sommes venus, s’élargir pour aboutir, au Nord, à la pointe de la Grande Vigie, l’extrême bout de Grande-Terre, et au Sud, à la pointe de Vieux-Fort, à l’extrémité de Basse Terre. Le tout surveillé par le volcan de la Soufrière, toujours coiffé d’un épais bonnet de nuages. En redescendant, on se met à l’eau dans un lagon côté nord pour notre seconde plongée. Au programme, un fort courant, des coraux (aïe, ça doit faire mal !) de beaux poissons et un immense plaisir !

Dimanche 19 février

Windguru annonçait une potentielle session pour Sainte-Anne. Nous décidons d’aller tenter le coup. Nous nous mettons à l’eau, mais le spot ne fonctionne pas. Le vent est vraiment très léger et la houle trop petite. Mais l’endroit parait prometteur… Nous espérons le découvrir dans quelques jours puisque notre grand guru du vent semble très optimiste pour la fin de la semaine.
L’après-midi, nous retournons à Pointe à Pitre pour assister au fameux carnaval qui se déroule aux quatre coins de l’île depuis début janvier, et qui doit se clôturer cette semaine. Le centre-ville est bouclé et on se gare en périphérie. On vient grossir, malgré nous, une marée humaine qui converge vers ce qui semble être le bruit de tambours. Dans cette masse circule toutes sortes d’objets, parapluies, bien sûr, mais aussi chaises, sonos, glacières énormes. On parait bien démunis, équipés de nos seuls appareils photos. Arrivés sur le trajet du défilé on découvre, intrigués, des gens tranquilles, confortablement installés, qui attendent, on a l’impression depuis des jours, le passage des groupes. Ceux-ci sont composés de deux parties : à l’avant les femmes qui dansent et à l’arrière les hommes qui jouent de la musique. Suit l’assistance avec, selon les goûts, caddies de bouteilles d’eau et chaussures de rechange ou voiture de sport reconvertie en discothèque. Les costumes sont très colorés, un peu à la mode brésilienne. Le groupe passe assez vite, avec sourires et roulements de hanches, suivis par les mesures des percussions. L’assistance reste, elle, incroyablement calme. Ni cris, ni danses, ni applaudissements… ce qui nous a beaucoup surpris quand on voit que d’habitude, à la moindre occasion, les antillais peuvent se mettre à danser n’importe où, n’importe quand. Mais bon, nous y étions au milieu de l’aprèm, en pleine chaleur et pas à l’heure du ti punch… 

Lundi 20 février

La météo n’est pas top pour la planche pour aujourd’hui et demain, avant la reprise du vent mercredi, qui doit se renforcer avec de bonnes conditions ce week end, le top ! On doit donc profiter des deux jours « off wind » qui nous restent pour boucler deux sites que l’on veut absolument voir : la pointe nord de Grande Terre, et la fameuse Soufrière.
Il a plu une partie de la nuit et ça continue ce matin… Il faut donc quitter Basse Terre pour espérer un temps sec. Comme le disent les antillais, il fait toujours beau quelque part sur l’île. Alors direction la Pointe de la Grande Vigie. La route traverse l’île par l’intérieur, pour aller rejoindre Port Louis à l’Ouest et Anse Bertrand au Nord. On se retrouve donc en milieu  rural . Alors que la culture de la banane domine sur sa jumelle, c’est la canne à sucre que l’on cultive massivement sur Grande Terre. Des champs s’étendent à perte de vue, et les tiges flexibles, aux reflets dorés, se balancent au rythme des alizés. On parvient quelques kilomètres plus loin à la petite ville d’Anse Bertrand, d’où part la route pour la Grande Vigie. Cette partie de côte est une nouvelle fois différente du reste de l’île. Exposée au Nord, elle se fait constamment maltraitée par la houle des dépressions de l’Atlantique Nord. Il en résulte une côte sauvage, découpée et composée uniquement de falaises de roches noires. Les fonds tombent rapidement, si bien que l’on retrouve dans la mer ce bleu intense caractéristique des grandes profondeurs. Le point de vue de la Grande Vigie est beau, mais on profite mieux de la magie des lieux en parcourant le sentier qui part de la « Porte d’Enfer » pour joindre le « trou du souffleur ». En fait de « Porte », il s’agit d’une calanque plantée au milieu des falaises, comme oubliée par l’action récurrente des flots. Devant cette belle eau cristalline on ne résiste pas au plaisir de se faire une petite plongée.
Après le pique-nique, on troque nos tongs pour les chaussures de rando, et on part sur le sentier du littoral. On se fait surprendre quelques enjambées plus tard par un grain qui nous trempe. Il ne fait pas vraiment froid alors on décide de continuer. Le chemin, qui sinue dans une végétation rase et verdoyante, longe les à pics des falaises. Il offre de multiples points de vue sur l’Océan d’où l’on aperçoit les îles de La Désirade et d’Antigua. On a donc le temps de voir arriver un second rideau de pluie du large qui, à peine le temps de trouver un abri sous de petits arbres, nous tombe dessus. Au bout de quelques minutes on sort de notre repère, et allons regarder au Nord : la voie est libre ! On chemine jusqu’au souffleur, un trou dans la roche d’où fusent des geysers d’eau de mer à chaque grosse série de houle. On reste un moment à contempler ce spectacle de la nature, et à se faire rincer par ces grosses gerbes qui atteignent, pour les plus hautes, une dizaine de mètres. Le soleil a largement repris le dessus, et un petit bain, la calanque retrouvée, nous fait le plus grand bien. Sur la route du retour, alors que je fais une marche arrière devant une maison, peu après un embranchement loupé, j’entends un « vas-y, vas-y, mets-toi à l’aise » et découvre, dans mon rétroviseur, un antillais tout sourire allongé sous sa terrasse.

Mardi 21 février

Aujourd’hui doit être le jour de la Soufrière, mais depuis notre réveil, le ciel ne fait que s’obscurcir. On prend quand même la route de Saint Claude, au sud de Basse Terre, d’où commence l’ascension. Il faut le tenter, et si on ne peut pas monter, on fera le tour de l’île pour arriver à Bouillante, seule partie de côte qui n’a pas encore vu nos mines réjouies de métros. La descente se fait dans l’incertitude car la partie orientale du volcan est bien chargée. On quitte la côte pour monter en direction de Saint Claude. La route se fait alors plus étroite et grimpe sensiblement, laissant perplexe le petit moteur de « ti poubelle », notre punto de location. Ce n’est qu’arrivés au parking que quelques éclaircies nous donnent espoir. Il y a beaucoup de voitures et aucun guide à l’entrée. On dit l’ascension délicate par mauvais temps, on s’attendait donc à ce que quelqu’un soit là pour veiller aux imprudences…
On commence la randonnée qui nous mène très rapidement à travers une végétation toujours très abondante, à l’ancien parking, qui n’est plus utilisé à la suite d’éboulements. De là, on aperçoit le cratère qui se dégage par intermittence des nuages. Ca va le faire ! On continue le sentier de pierre, rendu glissant par les récentes précipitations (mais lui arrive-t-il d’être vraiment sec ?), et on commence à sentir les premières émanations de soufre. En bon fans de volcans cette odeur caractéristique, au lieu de nous rebuter, nous excite et, alors qu’il reste encore une grosse heure de marche, on accélère le pas. On dépasse ainsi plusieurs groupes, et, pour ma minute intime, je me mets à penser que c’est top d’avoir le même rythme de marche dans un couple. Je serai en train de bouillir, comme la lave enfouie sous nos pieds, si je devais attendre Laetitia toutes les deux minutes. Quand je marche, j’aime bien tracer et surtout, surtout, ne pas rester tanquer au milieu des gens. Au lieu de ça, et malgré un handicap de longueur de jambes certain, elle colle à mes talons ou ouvre fièrement la trace.
On arrive au sommet et la visibilité est bonne. Le vent, qui glisse sur les flancs du plus haut sommet de l’île, rafraîchit et balaye les nuages qui filent au-dessus de nos têtes, laissant apparaître de temps à autre une percée de ciel d’un bleu pur. Le sentier est bordé de bornes jaunes fluorescentes qui servent à se repérer par temps de brouillard, et qui pour nous signifient que le temps n’est pas si mauvais… La roche est noire, surmontée par de la mousse et des plantes grasses rases. On repère rapidement la partie la plus intéressante, barrée par des « Ne pas franchir ». But we don’t speak french… On approche, en prenant soin de rester au vent des émanations de soufre. Le gaz est libéré par des cheminées jaunies qui soufflent bruyamment et sans discontinuer. Les vapeurs soulevées sont balayées par le vent et se mêlent aux nuages. L’ambiance est totale dans cette lumière changeante due aux brèves percées de lumière. On est une nouvelle fois transporté dans un monde fascinant, un des derniers territoires où l’action de l’homme ne peut rien. Tôt au tard, de manière inéluctable, la nature reprendra ses droits et montrera sa toute puissance. En redescendant on admire le panorama sur les îles des Saintes baignées par les eaux des Caraïbes, avec en premier plan une nature généreuse.
On reprend la voiture en direction de Bouillante, le fief de la plongée, où l’on fait un arrêt à la plage de Malendure qui se trouve dans la réserve Cousteau. On s’offre une petite plongée pour se détendre les muscles. On découvre de nombreuses plantes marines, et de multiples stalagmites creuses. Les poissons habituels sont présents : les jaunes et blancs à rayure, les bleus aux reflets multiples, et deux petits nouveaux, un de forme arrondie avec un gros point noir à l’arrière, et un bicolore, noir en haut, blanc en bas. En ressortant de l’eau le ciel s’est couvert, et quelques gouttes tombent. On fait la route de la traversée sous la pluie et une Soufrière bouchée : on a eu de la chance !

Mardi 28 février

Timinig parfait : après une semaine à toute blinde pour visiter les quatre coins de l’île, windguru annonce une semaine faya en Gwada ! Au programme : du vent et du swell ! Ça va envoyer !
Le mercredi doit être le premier jour du retour des Alizés. On prend donc la route de Sainte Anne pour découvrir un peu mieux les spots avant la rentrée de houle annoncée. On tombe sur le club « Freestyle School » tenu par Cyril et Hans, deux exilés au soleil depuis une dizaine d’années, et pas prêts de remettre un pied en métropole. Vu que le vent est assez fainéant pour son « come back », on en profite pour les squatter et tchatcher des différents spots. Et on fait bien, car ils ont également fait un trip en cata sur Antigua et Barbuda, nos prochaines escales ! Même s’ils n’ont pas eu de conditions de vagues, il semble y avoir un sacré potentiel, et surtout une eau incroyable. Texto, à leur retour : « on a trouvé notre lagon de Sainte Anne bien terne après Barbuda » !!! Ils nous lâchent aussi l’info décisive pour le lendemain, un secret spot !
Jeudi est un jour crucial ! J’exagère ? Non ! Une houle de Nord est annoncée. Et aux Antilles, une houle de Nord, c’est le graal attendu par tous ceux qui ont à faire, de près ou de loin, avec quelque chose qui va dans les vagues. L’équivalent chez nous de la houle de Sud. On est un peu réservé sur Le Moule, le seul spot connu sur la côte Nord, car la section qui se windsurf n’ouvre pas bien. Après renseignements, on apprend que le spot dévoile tout son potentiel par houle de Nord Est. Or aujourd’hui, c’est Nord, voire Nord-Ouest. Toujours suivant les conseils des « freestyle boys », nous prenons donc la direction de Sainte Rose, au Nord de Basse-Terre, à la recherche de ce fameux secret spot… Nous espérons le trouver d’après leurs indications car très peu de planchistes ont l’habitude de le rider. Au détour d’un virage notre première vision nous dévoile une mer blanche de moutons ! Un peu plus loin sur la route, on remarque l’ilet qu’ils nous ont décrit comme point de repère (et qui doit ressembler à une tortue, mais qui en fait ne ressemble à rien), mais pas de vagues. Un peu dépités, on se dit que ça ne doit pas marcher, ou qu’on ne doit pas être au bon endroit. On s’apprête à faire demi-tour quand Laeti me dit, ou plutôt crie : « Y a une planche ! ». Mais je ne vois rien. « Je crois que t’hallucines ma chérie ! ». « Mais non je ne suis pas folle, je te dis j’ai vu une planche derrière la pointe ». Je suis très sceptique, mais après quelques années de bourlingues passées ensemble, j’ai remarqué à de nombreuses reprises que je pouvais me fier à ses yeux bioniques, capables de distinguer un mouton ou une vague à plusieurs kilomètres. Par acquis de conscience, on tire donc à la plage d’après, et on découvre bel et bien un planchiste en train de rider un outside reef ! L’écume fume, signe d’une bonne orientation, et les séries paraissent généreuses. On se gare donc sur la fameuse plage de Rifflet. On y fait la connaissance de Hédric, un rasta antillais, très sympa. C’est le local du spot et son seul rider régulier. On le trouve sur son pick-up, harnais à la ceinture « Ouais man, c’est bon aujourd’hui, ça va le faire ». Ok man ! On grée nos voiles, surexcités, car le spot est… tribord ! La mise à l’eau est un peu délicate, avec shore break et grosse dévente, deux éléments que l’on aime pas voir réunis, mais il faut bien une contrepartie… Car le spot est idyllique : le vent side/side off est accéléré par effet venturi entre le cap et l’ilet. La vague pète sur un reef au large avec suffisamment d’eau pour passer partout. L’eau est turquoise et transparente. La longue plage de sable est plantée de cocotiers et surplombée par de hautes collines submergées de végétation tropicale. Rien que tirer des bords au planning, en short (!) dans ce décor, est incroyable. Alors quand on chope une série dans cette eau translucide, c’est surréaliste ! On se gave tout l’aprèm dans 1 m 50 à 2 m de vagues, au planning pour 5.3 et 4.2.
Vendredi la houle de Nord s’oriente Nord Est. On décide donc d’aller rider la vague de la Komunale, un bowl qui lève en face de la plage de la ville de Sainte Anne. La mise à l’eau est déventée, mais se fait dans un lagon. La passe est étroite, de 4 mètres environ, mais bien marquée par une tâche de sable qui dessine une ligne claire au fond de l’eau et qu’il suffit de suivre. Aujourd’hui le vent est léger, on ne plane pas, et les vagues ne sont pas très grosses. Je trouve quand même le moyen de casser mon mat au deuxième surf ! Bonne nage et sauvetage en jet ski par un antillais. Il me fait « oh man, t’as trop tiré sur ta voile ? ». Dégoutté (le mat a trois sorties…), je repars quand même à l’eau mais l’humeur n’y est pas. Laetitia, quant à elle, râle un peu contre le bâbord, mais se fait quand même une bonne petite session.
Samedi le vent doit être plus fort, toujours Est/Nord Est, avec houle d’Est. Direction Sainte Anne toujours, mais cette fois ci on décide de tester la vague de la Digue. Réputée pour se mettre à marcher avec de la houle plus conséquente, elle est plus longue que sa voisine, mais le spot n’est pas facile d’accès. On ne peut pas se mettre directement à l’eau sur le spot (c’est la plage du Club Med !). Il faut donc partir du club de Cyril et Hans, sur une plage au vent, tirer des bords pour passer entre deux reefs (inexploitables car quasi à secs), puis redescendre sous le vent de la digue. Tout ça sans planer, et donc avec un retour lui aussi pénible. L’autre option, plus courte, est de tirer droit à  l’abattée, traverser à pied la langue de sable qui sépare les deux plages, et se mettre à l’eau en face de la vague. Problème : la passe est très petite, et surtout sans eau. Tu y vois défiler la caille et les oursins à quelques centimètres de ta carène. Ce n’est pas très rassurant, surtout pour les poids plume comme moi dans 10 nœuds de vent... On y fait quand même une bonne session dans 1 m 50, en compagnie de quelques locaux qui assurent bien dans un vent super léger. La caille n’est vraiment pas loin, alors on ne se lâche pas trop…
Dimanche la komunale est bookée cause compète locale. On retourne à la digue, mais le vent n’est toujours pas très violent. Il prend quand même les tours 10 minutes… sous un grain ! On se croirait alors en Bretagne. La mer devient grise, et on se prend une sacrée rincée ! Après le grain, le vent tombe complètement, et il faut attendre que le temps se dégage pour qu’il se relève. Enfin se relève, c’est un grand mot, car ce n’est jamais très fort… On refait quand même une tentative, mais le vent, toujours très léger, et la marée basse auront raison de Laetitia qui n’ose pas repasser par la passe. L’eau est tellement claire que l’on a vraiment l’impression que l’on va heurter les patates. Elle décide de pousser son matos à pied, et finit sur le reef dans moins de 10 cm d’eau. Résultat : une quinzaine d’épines d’oursin dans chaque pied…! Ces cochons s’agrippent au reef et forment d’impressionnants bouquets. Si tu y mets un pied t’es mal barré, les deux t’as qu’à rentrer ! En plus, ils doivent t’envoyer une espèce de venin, et Laetitia a une heure douloureuse… Enfin on apprendra les jours suivants, qu’à marée basse il n’y a effectivement plus vraiment de passe, et que la technique est alors : « Pense à tes pieds, et tant pis pour les ailerons ». Sur la route du retour, on passe devant le spot des Salines qui semble venté. Pour conjurer le sort on se remet à l’eau pour profiter d’un vent plus soutenu. On aura droit à quelques bords au planning et quelques surfs sur le reef, c’est déjà ça.
Lundi, on remet ça aux Salines. Les oursins nous ont bien calmés, et un embouteillage monstre à l’entrée de Sainte-Anne a fini de nous décider. On a droit à la même session qu’hier, avec un planning de temps en temps, et une vague qui pète sur un reef au large, avec un mètre d’eau sous les ailerons. La vague est sympa, mais le vent un peu side on. On se fait quand même une bonne session dans 1 m 50 de vagues, plus faciles que la veille.
Aujourd’hui, mardi, on retourne à Sainte Anne. Il faudrait faire quelques photos et pour cela le spot de la digue est parfait, car on peut se caler à côté du rideur. Mais la Komunale fonctionne, et on décide d’aller l’honorer. En partant du club, il faut tirer des bords de près pendant un moment et prendre son mal en patience avant d’arriver à la vague. On commence donc notre longue remontée. On a toutefois de la chance aujourd’hui car c’est le jour de vent le plus fort, avec, d’après windguru, entre 21 et 25 nœuds… Ce qui se traduit par 10 /17 nœuds réels. On est donc limite planning en 5.3 et 4.2, ce qui n’est finalement pas mal du tout comparé aux autres jours… Enfin, quand je dis limite planning, ça ne veut pas dire qu’on plane limite, non, ça veut dire qu’on ne plane pas, mais qu’avec quelques nœuds de plus, on pourrait… Arrivée en haut, le bowl marche effectivement avec de belles séries à 2 mètres. La vague est courte, bien creuse, et le vent side, voir side off en fin de vague. On se fait une grosse session où on prend enfin, vagues après vagues, de l’assurance dans ce vent bâbord, contre nature pour nous. Laetitia me fait même complètement halluciner quand je la vois revenir avec les plus gros sets de la journée : au buttom la lèvre frise au niveau de son logo Tabou !! Elle sort de la vague avec un sourire d’une oreille à l’autre : lé bon le wind en gwada !

Mercredi 29 février

Ça y est, l’heure de la dernière session (en Gwada) a sonné… snif ! On doit récupérer les parents de Laeti à l’aéroport cet après-midi, avant de tous embarquer sur le cata de René vendredi. On s’est trop gavé hier pour ne pas retourner à la Komunale. On file donc sur Sainte Anne avec un timing un peu serré qui ne nous laisse que deux heures de nav ce matin. Le vent est fort puisqu’on a 10/15 nœuds, rafales à 16… La houle est présente avec 2 mètres, et séries à un bon gros logo ! On se fait une dernière session dantesque, 5 à l’eau (l’embouteillage !). Les séries partent de très loin, derrière la bouée, pour les plus grosses, qui est située pourtant bien au large du reef. En haut de la vague, tu regardes le bowl se former, tu serres les fesses, écartes la main arrière et descends ce gouffre parfaitement glassy, avant de regarder, bien, bien au-dessus de ta tête, la lèvre translucide. Tu frappes la lèvre et redescends à mach 12. Ouah… une vague, un roller, de la pure adrénaline en one shoot. Ultra rapide, ultra efficace. Aujourd’hui on en oublie que le vent est bâbord. On enchaîne les vagues sur un nuage « merci la Gwada ! ».
La sortie de l’eau nous ramène, un petit peu, à la réalité. On prend conscience que l’aventure guadeloupéenne touche à sa fin, déjà. Le temps file dans un doux contraste : on est en même temps tristes que cela soit passé si vite, mais on a, dans le même temps, l’impression d’être en Guadeloupe depuis 6 mois, tant on s’y sent bien… Je dois reconnaître, le premier, que je suis séduit. Car j’étais réticent, je le reconnais. Je ne voulais y rester que 2 jours pour rejoindre au plus vite Porto Rico. Mais on s’est laissé porter par le voyage, et nous avons trouvé René qui ne pouvait nous embarquer en bateau stop que début mars, alors on y est resté 17 jours. Au final, on a découvert une île magnifique, très variée, aux paysages sublimes, et aux habitants extrêmement chaleureux et sympathiques. On a en plus eu la chance d’avoir de solides conditions (on a, d’après les locaux, eu de la chance…), qui nous ont permis de rider différents spots, et nous ont offert d’inoubliables sessions
de vagues. Bref, la Gwada nous a « éclaté » !!!

5 commentaires:

  1. Les termes techniques de planche n'ont pas eu raison de moi... j'ai tout lu mais pas tout compris :)

    RépondreSupprimer
  2. guy,
    Du bonheur pour vous deux...pense à moi dans les surf by night.

    RépondreSupprimer
  3. content que vous avez eu du vent en guadeloupe et que vous avez pu découvrir cette île extraordinaire pour la diversité des paysages et des fonds. Continuez de nous faire rêvez... bises. Steph et Karine

    RépondreSupprimer
  4. ok,, j suis opérationnelle: une fenêtre ouverte pour les textes, une 2ème pour visualiser les photos en même temps et une Troisième avec une carte de Gwada pour suivre le parcours...Voilà voilà, vous m'avez fait rêver avec vos spots d'eau bleu turquoise, bientôt bientôt moi aussi j remettrai les pieds sur ma board!! Plein de bizz Pampers
    Solenne, Tyte & Loïs

    RépondreSupprimer
  5. PS: je ne vois pas trop ce que vous voulez dire quand vous parlez de "centaines de gosses déchaînés pendant la récréation"?!!

    RépondreSupprimer